Haïku sans domicile fixe

Un recueil en ligne dédié à celles et ceux que nous croisons chaque jour, et que bien souvent nous ne voyons plus  : SDF, sans-abris, mendiants, nomades, roms, clochards et autres « habitants » de nos rues…

flot des passants –
le vieux mendiant
parle à son chien 

*

petit matin –
devant le café fermé
le même homme qu’hier

*

froid polaire –
comme tous les midis
le bonjour du mendiant

*

duvet bien à plat
et couverture pliée –
son coin de porte au carré

*

veille de Noël –
quelques pièces de monnaie
dans son bonnet rouge

*

camp rom –
un gamin assis devant
un feu de palettes

*

pause déjeuner –
les béquilles du mendiant
au pied du feu rouge

*

trottoir du centre minceur –
une SDF me demande
un ticket restau

*

soir d’encombrants –
les cartons neufs
du sans-abri

*

entre égout et canal
la tente du SDF
grande ouverte au soleil

*

soirée glaciale –
une ombre assise
dans le lavoir automatique

*

lèche vitrine –
coup de pied dans la soucoupe
d’un mendiant !

*

20 cents dans sa casquette
la calvitie bronzée
de l’accordéoniste

*

parc du centre ville –
à la radio du SDF
les cours de la bourse

*

sur son bras maigre
un prénom de femme
presque effacé

*

pour miroir une vitrine
pour peigne ses dix doigts
le SDF

ruelle grise –
un amas de couvertures
en chien de fusil 

*

un homme fouille
chaque poubelle de la place
– jusqu’au fond

*

deux de l’An –
le « Bonne année » du SDF
à tous les passants

*

aux pieds du mendiant
assis sur le trottoir
des confettis multicolores

*

pluie sur le canal –
les mouettes tournent
sur le camp de nomades

*

nuit sur le camp rom –
un fauteuil roulant à la porte
d’une caravane

*

au pied de la vitrine
de la « Boutique Minceur »
un mendiant assis

*

cohue du matin –
d’une SDF l’offrande
d’un sourire

*

au pied
du conteneur à bouteilles
un sac de couchage

*

clôture du terrain vague –
des vêtements d’enfants
au soleil de janvier

*

premiers passants –
au pied de la banque
déjà assise

*

camp de nomades –
la lueur d’un brasero
dans le soir d’automne

*

retour de vacances –
le mendiant du centre ville
… plus bronzé que moi

*

trottoir au soleil –
le vieux clochard contemple
les passants pressés

*

loin de son pays –
ici pas même un toit
de paille pour la nuit

*

à cloche pied
vers son coin de rue
le petit mendiant

roms du feu rouge –
un air d’accordéon
dans le flash infos 

*

miroir brisé –
la dame sans abri
s’épile les sourcils

*

devant la banque
une bohémienne déchiffre
les lignes de chance

*

contre le moteur
du manège de Noël
un sans-abri assoupi

*

poubelles publiques-
le déjeuner en self service
du sans-abri

*

campement de caravanes
entre périph’ et chantier –
les grues illuminées

*

la mendiante assise
à la porte de la banque –
le dimanche aussi …

*

pour mendier
il tend la main
… qu’il n’a plus

*

cohue de Noël –
lui aussi chagé de sacs
le sans-abri …

*

banc du square –
autour d’elle sa vie
en sacs plastique

*

un groupe de sans-abris
sur le trottoir au soleil –
premier jour d’automne

*

soleil d’août –
couverture sur le dos
il ramasse un mégot

*

mendiante du square –
son croûton de pain partagé
avec les pigeons

*

à même le sol
le sans-abri couché
– le flot des passants

*

rue de Noël –
un homme à genoux
yeux clos, main tendue

*

« une p’tite pièce, Madame
pour manger – que j’bois pas !
que c’est dur, Madame! »

(C) Damien Gabriels (2018)